Insectes : un consortium pour épauler une filière en devenir

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Insectes : un consortium pour épauler une filière en devenir

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En milieu urbain et péri-urbain, où la gestion des déchets est plus que jamais un enjeu majeur, l’entomoconversion (leur bioconversion via la culture d’insectes) offre une solution séduisante mais pose aussi des questions spécifiques, en termes d’hétérogénéité des biodéchets, de maîtrise des risques sanitaires, de contraintes réglementaires et sociétales. C’est autour de cette évaluation bénéfice-risque globale que va travailler un nouveau consortium pluridisciplinaire, Insect4City, coordonné par l’unité QuaPA, dans le cadre d’un appel à projet du métaprogramme BETTER « Bioéconomie pour les territoires urbains ».

illustration insectes bis

En France comme dans plusieurs autres pays européens, de nombreuses entreprises se sont lancées dans la production d’insectes de masse à plus ou moins grande échelle selon l’entreprise, l’insecte et les substrats. Cette activité est en passe de prendre un nouveau tournant et une nouvelle dimension, avec l’enjeu du recyclage par entomoconversion des biodéchets ou résidus organiques en milieu urbain et péri-urbain.

L’entomoconversion est en effet un moyen prometteur de recycler des biodéchets et de fournir des sources durables de nutriments et micronutriments bio-sourcés, de protéines de bonne qualité pour les filières animales, ainsi que d’autres produits à haute valeur ajoutée (lipides, biocarburants, chitine, engrais…).

Si l’on veut produire des protéines pour l’alimentation animale, l’entomoconversion doit respecter d’un point de vue réglementaire les cahiers des charges de production de protéines pour animaux.

Outre les bénéfices écologiques (procédés biosourcés, économie circulaire, recyclage de déchets) et nutritionnels attendus de l’entomoconversion, la viabilité et l’expansion de ces nouvelles filières productrices reposent plus que jamais sur une parfaite maîtrise de la sécurité sanitaire, qu’il s’agisse de risques chimiques ou microbiologiques. Les insectes pourraient notamment concentrer certains contaminants issus de l’environnement (polluants organiques persistants, éléments trace métalliques), des intrants végétaux (pesticides, mycotoxines) ou des composés éventuellement néoformés ou transférés au cours des procédés technologiques. Par ailleurs, l’exploitation de déchets organiques de l’agriculture peut introduire des dangers microbiens (parasites, bactéries et leurs toxines, virus) qui pourraient être vectorisés par l’insecte.

C’est autour de cette évaluation bénéfice risque globale que va se focaliser le travail du consortium. Il abordera, en amont du développement de cette filière à fort potentiel, les questions que peuvent se poser le grand public, le législateur, le producteur d’insectes sur ce moyen de valoriser les biodéchets. Le but est de lever des verrous qui pourraient freiner leur utilisation dans une approche de bioéconomie circulaire.

Le consortium INRAE est composé de chimistes, microbiologistes, toxicologues, nutritionnistes, socio-économistes, zootechniciens, mais aussi de spécialistes des procédés, des sciences du goût, de l’évaluation des impacts environnementaux ou sociaux, et de l’ingénierie des connaissances. Une douzaine d’unités INRAE sont impliquées, ainsi que quelques partenaires. Le kick-off du consortium s’est tenu les 16-18 décembre dernier. Le consortium a notamment pour ambition d’identifier les sujets prioritaires et de fédérer des équipes INRAE qui sont nombreuses à s’intéresser à l’entomoconversion mais qui se connaissent peu afin de favoriser les synergies pluridisciplinaires, le développement de partenariats publics et privés (entreprises, académiques, pouvoirs publics, aglomérations,…), et monter des programmes de recherche nationaux et internationaux.

Quels marchés sont concernés ?

L’incidence est potentiellement forte sur les chaines alimentaires humaines. L’exemple le plus intéressant est la pisciculture. L’entomoconversion s’y révèle une solution écologiquement pertinente, et on peut faire cette production de façon locale en mode « bioéconomie circulaire ». L’ouverture potentielle l’année prochaine de la filière aviaire et de la filière porcine à ces nouveaux aliments augmenterait fortement le potentiel de ce marché, avec des milliards à la clé et des milliers d’emplois à l’échelle européenne. Le marché des animaux de compagnie, que ce soient les poissons, les chiens et chats, les oiseaux (y compris les poules domestiques) est d’ores et déjà destinataire des solutions proposées par l’entomoconversion.

Contact : erwan.engel@inrae.fr, UR QuaPA, équipe MASS.